
Vous avez lancé votre activité, et une question revient vite :
“Quelles assurances suis-je obligé de prendre ?”
Entre la RC Pro “indispensable”, la multirisque “recommandée”, la décennale “obligatoire sauf si pas tout à fait”, difficile de démêler le vrai du commercial.
Spoiler : la loi n’impose pas autant que certains voudraient vous le faire croire.
Dans cet article, on vous explique ce que vous êtes réellement tenu de souscrire selon votre activité, ce que vous pouvez refuser (en toute légalité), et ce qui mérite quand même réflexion si vous tenez à votre santé financière.
Ce que la loi impose (et rien de plus)
La loi est claire, même si beaucoup essaient de la tordre pour vendre.
En matière d’assurance professionnelle, vous n’avez que trois grandes obligations légales :
→ si vous exercez une activité réglementée, si vous intervenez dans le BTP, ou si vous utilisez un véhicule à usage pro.
Le reste est conseillé — pas imposé.
RC professionnelle : obligatoire uniquement pour certaines professions
Contrairement à ce qu’on laisse entendre, la responsabilité civile professionnelle n’est pas obligatoire pour tout le monde. Elle est imposée uniquement aux professionnels dont l’activité est encadrée par un ordre, une autorité de tutelle ou une réglementation stricte.
Exemples de professions concernées :
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Professions médicales (médecins, infirmiers libéraux, ostéopathes)
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Experts-comptables, notaires, avocats
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Agents immobiliers, architectes
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Travailleurs du chiffre ou du droit en général
Dans ces cas, l’obligation est inscrite dans la loi ou le code de déontologie. Ne pas être assuré peut entraîner l’interdiction d’exercer.
Pour les autres pros (artisans, commerçants, freelances non réglementés), la RC Pro reste fortement recommandée, mais pas imposée légalement.
Garantie décennale et Dommages-Ouvrage : uniquement pour le BTP
Si vous intervenez dans le secteur du bâtiment, les obligations changent.
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La garantie décennale est obligatoire pour tout constructeur, artisan, maître d’œuvre ou entreprise qui intervient sur un chantier pouvant affecter la solidité ou la destination d’un ouvrage (maison, toiture, gros œuvre…).
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La Dommages-Ouvrage, elle, est obligatoire pour le maître d’ouvrage (le client qui commande les travaux), qu’il soit un pro ou un particulier.
Cas fréquents mal compris :
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✅ Un électricien sous-traitant n’est pas toujours tenu de souscrire une DO (mais peut être concerné par la décennale selon le chantier)
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✅ Un promoteur ou artisan qui construit pour son propre compte doit les deux
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❌ Un peintre décoratif ou un dépanneur n’est généralement pas concerné par ces obligations
Ces assurances sont régies par les articles L.241-1 à L.243-1-1 du Code des assurances.
Assurance auto : si vous utilisez un véhicule à usage pro
Dernier cas d’obligation : le véhicule professionnel.
En France, tous les véhicules terrestres à moteur doivent être assurés a minima au tiers (RC auto), que ce soit :
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un véhicule personnel utilisé à des fins professionnelles (ex : livreur Uber Eats auto-entrepreneur)
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un véhicule appartenant à l’entreprise (flotte, véhicule utilitaire)
→ L’usage professionnel doit être déclaré. Sinon, en cas de sinistre, vous risquez :
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une absence de prise en charge
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une résiliation de contrat
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voire une poursuite pour fraude à l’assurance
Conseil pratique : vérifiez si votre usage est bien couvert par votre contrat actuel, même si vous êtes seul à bord.
Ce qu’on vous pousse à prendre (pas toujours à raison)
Il y a ce que la loi exige. Et il y a ce que le marché vous suggère parfois avec insistance.
Dans le doute, beaucoup de professionnels signent des contrats “par sécurité”, “au cas où”, ou “parce que tout le monde le fait”.
Résultat : des milliers de pros surassurés, mal couverts ou tout simplement floués.
Voici trois types de contrats qu’on vous pousse souvent à prendre… sans forcément que ce soit pertinent.
La multirisque professionnelle (MRP)
C’est le contrat fourre-tout par excellence. La multirisque pro vous propose, en une seule formule, de couvrir vos locaux, votre matériel, votre stock, votre responsabilité civile d’exploitation, voire parfois votre perte d’exploitation.
Sur le papier : c’est rassurant.
Dans la réalité : c’est souvent surdimensionné ou mal calibré.
→ Ce contrat est utile uniquement si vous avez un local, du matériel de valeur, ou des biens à protéger physiquement.
Mais si vous êtes freelance en télétravail, consultant sans bureau ni matériel coûteux ?
Vous risquez de payer pour des garanties dont vous n’avez strictement pas besoin.
Attention aussi aux exclusions : incendie, vol, dégât des eaux… oui, mais dans quelles conditions ? Avec quelles franchises ? À quel plafond ?
La prévoyance individuelle
C’est un contrat qu’on vous proposera très tôt — parfois dès l’ouverture de votre statut.
Elle couvre les risques lourds : arrêt de travail, invalidité, décès.
Le problème ?
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Beaucoup de contrats sont signés sans réelle analyse de vos besoins
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Les montants d’indemnisation sont flous
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Les délais de carence ou d’indemnisation sont mal compris
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Et les exclusions (psychologiques, sportifs, etc.) sont rarement évoquées clairement
La prévoyance n’est pas obligatoire, mais elle peut être essentielle si :
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Vous êtes votre seul revenu
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Vous avez des charges fixes lourdes (crédit, enfants, loyer)
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Vous ne pourriez pas tenir financièrement plus de 30 jours sans revenu
Mais elle ne doit jamais être prise à la va-vite. Un mauvais contrat vous donne une fausse sécurité.
La cyberassurance
C’est le “nouveau contrat tendance” dans les réseaux pros.
Et il y a une part de vérité : les cyberattaques se multiplient, y compris pour les petites structures.
Mais ce contrat reste très mal compris et souvent vendu à tort.
Ce qu’il faut savoir :
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Si vous ne stockez pas de données clients sensibles, ne gérez pas de e-commerce et n’utilisez que peu de solutions numériques critiques, une cyberassurance est rarement prioritaire.
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En revanche, si vous avez une base clients, un système de réservation en ligne, ou des obligations RGPD : elle devient plus stratégique.
Là encore : le vrai sujet, ce n’est pas le contrat, c’est votre exposition réelle au risque.
Et si elle est faible, un bon antivirus + des sauvegardes régulières + une formation à la cybersécurité valent souvent plus qu’un contrat.
Ce qui mérite réflexion (même si ce n’est pas obligatoire)
Légalement, vous n’y êtes pas obligé.
Mais entre ce que la loi tolère et ce que la réalité impose, il y a souvent un décalage.
Certains contrats ne sont pas obligatoires, mais deviennent presque vitaux dès qu’on sort du scénario idéal.
Voici les cas où réfléchir à une assurance spécifique peut vous éviter de gros ennuis.
Vous travaillez avec du public ? → Pensez à la RC Pro
Vous recevez des clients dans vos locaux ?
Vous intervenez chez eux ?
Vous manipulez des objets qui ne vous appartiennent pas ?
En cas de dommage causé à un tiers, c’est votre responsabilité civile professionnelle qui entre en jeu.
Même si elle n’est pas obligatoire, elle devient indispensable dans la vraie vie.
Une maladresse, un appareil endommagé, une blessure, une erreur de conseil… et c’est vous qu’on appellera à la barre.
RC Pro = assurance juridique + tranquillité mentale.
Pas obligatoire. Mais parfois salvatrice.
Vous avez un local, du stock, du matériel ? → Multirisque conseillée
Un dégât des eaux. Un incendie. Un cambriolage. Une tempête.
Quand on a du matériel, un local, un stock, on ne joue plus à pile ou face.
La multirisque pro permet de couvrir :
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Vos biens (mobiliers, équipements, ordinateurs…)
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Vos locaux (si vous êtes locataire ou propriétaire)
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Vos pertes d’exploitation (si votre activité est arrêtée suite à un sinistre)
Là encore : c’est le contexte qui fait le contrat.
Si vous n’avez rien à perdre physiquement, cette assurance est inutile.
Mais si un sinistre vous cloue au sol pendant 3 semaines, elle peut vous sauver.
Vous êtes votre seule source de revenu ? → Prévoyance = clé de survie
Pas de salaire. Pas d’indemnités journalières correctes. Pas de couverture employeur.
Bienvenue dans la réalité de la plupart des indépendants.
Si vous êtes malade, accidenté ou hospitalisé : qui paie vos charges ?
La prévoyance individuelle vous permet d’avoir :
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Une indemnité journalière en cas d’arrêt de travail
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Une rente en cas d’invalidité
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Un capital versé à vos proches en cas de décès
Ce n’est pas du confort.
C’est un filet de sécurité quand vous ne pouvez plus travailler et que personne ne vous remplace.
Vous gérez des données clients ? Cyber n’est pas à exclure
Base de données, facturation en ligne, prises de rendez-vous automatisées, fichiers sensibles…
Le numérique, c’est pratique. Jusqu’au jour où c’est bloqué, volé, ou corrompu.
La cyberassurance peut alors :
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Couvrir vos frais de remise en état
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Vous défendre en cas de litige RGPD
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Rembourser des pertes d’exploitation
Si vous êtes très exposé au digital, c’est une assurance à envisager.
Pas une priorité pour tout le monde, mais une vraie réflexion à avoir si votre activité dépend d’outils numériques critiques.
Comment faire les bons choix sans se faire avoir ?
Trop de pros signent des contrats “pour être tranquilles”, sans trop savoir ce qu’il y a dedans.
Résultat : des mensualités qui tombent tous les mois, et des garanties qui ne couvrent rien quand il le faut.
Avant de signer quoi que ce soit, posez-vous ces 4 questions. Et répondez-y honnêtement.
Posez-vous les bonnes questions :
1. “En cas de pépin, qu’est-ce que je perds vraiment ?”
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Matériel pro ?
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Clients ?
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Revenu ?
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Crédibilité ?
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Logement ?
Ce que vous risquez détermine ce que vous devez assurer. Le reste, c’est du superflu.
2. “Mon activité crée-t-elle un risque pour les autres ?”
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Je reçois du public ?
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J’interviens sur des chantiers ?
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Je donne des conseils à impact financier ?
Si vous pouvez être tenu responsable, même sans faire exprès, une RC Pro devient vitale.
3. “Mes clients, partenaires ou financeurs m’imposent-ils une assurance ?”
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Une banque vous demande une assurance emprunteur ?
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Un client exige une attestation RC pour signer un contrat ?
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Une fédération ou un appel d’offre impose un niveau de couverture ?
Dans ce cas, l’assurance n’est plus un choix. C’est une condition d’accès au business.
4. “Est-ce que je comprends vraiment ce que je signe ?”
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Franchise ?
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Plafond ?
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Carence ?
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Exclusions ?
Si vous ne comprenez pas un terme, vous ne devez pas signer.
Point final.
Faites le point AVANT de signer
Un contrat d’assurance, ça se relit à froid. Pas dans un bureau, pressé par un conseiller qui “n’a que 10 minutes”.
Posez vos vraies contraintes, vos vrais risques, vos vrais objectifs.
Puis comparez ce qu’on vous propose à ce que vous attendez.
Et si vous sentez qu’on essaie de vous faire peur, fuyez. La peur ne fait jamais un bon contrat.
Le conseil FERMALT
Avant de signer un contrat, demandez-vous toujours : est-ce que je comprends exactement ce que je paie et pourquoi ? Si la réponse est floue, posez des questions. Beaucoup. C’est votre boîte, pas leur bonus.